Noami Jourdain a grandi à Uashat, une petite communauté de 1500 Innus dans la municipalité régionale de comté des Sept-Rivières, sur la Côte-Nord : « Je suis le bébé d’une famille de sept enfants, avec mon frère jumeau. » Passionnée de voyages et de littérature, la jeune femme de 28 ans vient de terminer une formation en protection et exploitation de territoires fauniques au centre de formation professionnelle (CFP) du Grand-Fjord, pavillon La Baie, dans la région du Saguenay. Pour clore une formation qu’elle qualifie de « magnifique », elle a fait un stage à l’Agence Mamu Innu Kakussesht (AMIK) qui s’est concentrée sur le saumon noir et la zostère, à Sept-Îles.
Années d’apprentissage Noami Jourdain a grandi à Uashat, une petite communauté de 1500 Innus sur la Côte-Nord. À 17 ans, après l’obtention de son diplôme d’études secondaires, Noami a approfondi sa passion pour la littérature en langues, lettres et communication. Après son diplôme d’études collégiales (DEC), elle a réalisé un rêve d’enfance : vivre un séjour d’immersion à Los Angeles, avec ses plages et son charme, dans le cadre du programme Education First. À son retour, elle a expérimenté différents cours universitaires, mais sans trouver le programme qui lui convenait. « À l’université, j’étais un peu perdue.
J’avais de la difficulté à rester assise, passive, simplement à écouter. Chez les autochtones, de manière générale, on a de la difficulté avec la théorie, ce n’est pas comme cela qu’on se transmet des connaissances, des techniques. On apprend en observant. Ma mère, par exemple, m’a appris à cuisiner en me montrant ce qu’elle faisait, sans avoir besoin de discuter. »
Dans les années qui ont suivi, la jeune Innue a travaillé en service à la clientèle, un domaine où elle excelle. Elle a économisé et s’est offert un autre voyage d’immersion, en Australie cette fois, où elle est restée quatre mois, d’abord à travailler puis à visiter le pays d’Oz, dans le cadre du programme Global Work & Travel.
Apprendre à se connaître Après un DEC en littérature, elle essaye quelques cours universitaires sans que ceux-ci ne l’accrochent réellement. Au moment où la pandémie de COVID-19 s’est propagée au Canada, à l’été 2020, Noami allait rependre son sac à dos et parcourir l’Europe. « Cet arrêt obligé m’a amenée à réfléchir. Je me suis demandé où j’étais le plus heureuse et la réponse était pour moi évidente : à mon chalet, où je ressens une véritable paix intérieure. »
« À un certain moment, je me suis dit : fonce, va chercher les connaissances qui te manquent. Fais ton chemin. C’est ce qui m’a donné envie de suivre le DEP en Protection et exploitation de territoires fauniques »
Noami Jourdain, agente de conversation chez AMIK
Mais, contrairement à ses parents qui possèdent une connaissance millénaire de la forêt, Noami sent qu’elle a encore beaucoup de choses à apprendre, et que les occasions de se retrouver dans le bois en leur compagnie sont peu nombreuses : « J’ai appris à pêcher l’omble de fontaine avec mon père sur notre territoire ancestral sur le Grand lac Germain, mais la forêt, c’est vaste; entre mes parents et moi, le transfert des connaissances ancestrales ne s’est pas fait aussi intensément que pour les précédentes générations », commente-t-elle.
Elle décide alors de s’inscrire au programme Protection et exploitation de territoires fauniques (PETF). « À un certain moment, je me suis dit : fonce, va chercher les connaissances qui te manquent. Fais ton chemin. C’est ce qui m’a donné envie de suivre le DEP en PETF, pour développer mes connaissances sur la forêt, gagner en autonomie et en faire mon métier. »
Retour aux études Alors que le virus de la COVID se propageait à travers le monde, Noami s’interroge sur son cheminement. Son désir d’en apprendre plus sur elle-même ainsi que la faune et la flore la pousse vers le DEP en Protection et exploitation de territoires faun Pour suivre sa formation, Noami a dû quitter la communauté et prendre un appartement au Saguenay. Elle qui avoue d’emblée être très proche de sa famille et de ses amis redoutait un peu cette séparation. Heureusement, son groupe-classe et ses enseignants ont largement compensé l’ennui ressenti : « Nous étions tellement une belle cohorte! Des gens qui partagent mon amour de la nature, avec des valeurs similaires. Nous nous sommes soutenus tout au long de notre formation. Je me suis fait des amis pour la vie! Les enseignants étaient passionnés.
Chaque matin, en me levant, j’avais hâte d’être en classe. Déplacement en forêt, survie, camping, randonnée, prévention, sensibilisation : on a tout essayé et on a tellement appris. J’ai bien aimé la région, les activités de chasse et de pêche qu’on peut y mener, et les Saguenéens sont accueillants. » Outre l’aide financière de son conseil de bande, Noami mentionne l’aide et le soutien que lui ont apportés ses parents et sa famille : « Ils m’ont soutenu de façon incroyable dans cette aventure. Je leur dois beaucoup. »
« J’ai envie de développer ma connaissance de la cuisine traditionnelle, par exemple, cela est utile dans le bois. De développer des projets auprès des jeunes, dans ma communauté. »
Noami Jourdain, agente de conversation chez AMIK
Des projets passionnants Noami quitte alors sa communauté direction le Saguenay où elle sera accueillie par des enseignants et élèves qui partagent la même passion pour les territoires fauniques. Pour terminer sa formation, Noami a suivi un stage à l’AMIK où elle s’est intéressée au saumon noir. Elle a été engagée à la fin de sa formation par cet organisme qui soutient les communautés innues dans le développement durable de l’industrie de la pêche.
Dans les prochaines années, elle souhaite suivre son instinct et continuer à apprendre au fil des projets : « Je n’aime pas la routine, je m’intéresse à une foule de choses. J’ai envie de développer ma connaissance de la cuisine traditionnelle, par exemple, cela est utile dans le bois. De développer des projets auprès des jeunes, dans ma communauté. Je veux aussi continuer à voyager, à passer du bon temps avec Asher, mon labrador, et prendre le temps de décrocher en allant au chalet. »
Vous pouvez consulter les autres vidéos liées à la formation et au métier sous l’onglet Liens utiles et vidéos de la page programme de formation Protection et exploitation de territoires fauniques.
Le métier d’agent de conservation Pour terminer sa formation, Noami a suivi un stage à l’AMIK où elle s’est intéressée au saumon noir. À la fin de stage, elle réussira à y décrocher un emploi. Les agentes et agents de conservation patrouillent en forêt. Ils font observer les règlements de chasse et de pêche sur un territoire, portent assistance aux visiteurs en forêt et participent à l’aménagement des territoires fauniques. Cette formation de 1 320 heures menant à l’obtention d’un diplôme d’études professionnelles (DEP) est offerte dans sept centres de formation au Québec.
« Grâce à ma formation en protection et exploitation de territoires fauniques, je ne vois plus la forêt de la même façon. »
Noami Jourdain, agente de conversation chez AMIK
Dans le cadre de leurs fonctions, les agentes et agents peuvent avoir à guider les chasseurs et les pêcheurs ou à assister les biologistes lors des inventaires en milieu naturel. C’est un métier stimulant pour qui aime travailler au grand air en nature. Un emploi comme agent de conservation exige une bonne condition physique et des qualités de débrouillardise, d’autonomie et de responsabilité.