
En 2008, Danny Csoman a été victime d’un grave accident de véhicule tout-terrain, percutant un cap de roches après une sortie de route. L’impact a été très violent et sa colonne vertébrale brisée a comprimé sa moelle épinière, le laissant paralysé.
Les années qui ont suivi ont été éprouvantes, tant sur le plan physique que moral: des mois de rééducation pour réapprendre à vivre autrement, un combat contre les assurances qui refusaient de l’indemniser, une séparation douloureuse et l’acceptation difficile de sa nouvelle réalité. Il a également tenté de reprendre son poste chez son ancien employeur, une entreprise de réfrigération: «J’ai essayé un job de bureau pendant quelques années, mais ce n’était définitivement pas pour moi», confie Danny.
Une reconversion professionnelle

Avant son accident, Danny était apprenti frigoriste, un métier qu’il appréciait particulièrement. «Me déplacer chez les clients pour les installations, ce n’était plus possible…», confie-t-il. Contraint de repenser son avenir professionnel, il a voulu aborder ce changement non comme une contrainte, mais comme une opportunité: celle de relever de nouveaux défis et de se réinventer. nouveaux défis et une occasion de se relancer professionnellement.
Avec le Semo Montérégie, un organisme dont la mission est d’aider à la formation et au maintien à l’emploi des personnes handicapées, Danny a réalisé différents tests d’aptitudes et jonglé avec l’idée de retourner étudier. «Je me suis posé la question: qu’est-ce que je peux faire? Et qu’est-ce qui m’allume? Un job physique!»
Danny, qui avait déjà une certaine expérience en soudure, se renseigne alors sur les formations offertes dans sa région, en Montérégie. Il a découvert que le Centre de formation professionnelle Pierre-Dupuy pouvait l’accueillir dans son programme de soudage, avec un nouveau cours débutant sous peu.
À 34 ans, Danny décide de retourner à l'école. «J’ai été super bien accueilli et tout s’est bien passé pour moi. J’étais le premier étudiant en fauteuil roulant à suivre une formation en soudure! Les enseignants sont des professionnels du métier, ils connaissent les rouages du domaine, et l’école est équipée des dernières technologies, c’est vraiment la crème de la crème. »
Danny reconnaît toutefois que la soudure s’avère une formation et un métier exigeants: «Nous étions 32 le premier jour de classe, mais nous avons fini moins de dix dans ma cohorte. C’est un métier où l’on travaille fort, dans des conditions parfois pénibles, c’est demandant. J’ai vu rapidement que j’étais doué, et cela m’a rassuré pour la suite sur le marché du travail, mais, pour ne rien vous cacher, habituellement, après une journée au boulot, je me couche de bonne heure!»
La FP comme levier
C’est en 2016 que Danny s’est inscrit au CFP Pierre-Dupuy en Soudage d’acier inoxydable (GTAW et RSW). Cette Attestation d’études professionnelles (AEP) d’une durée de 720 heures est conçue principalement pour les adultes qui retournent en formation. Cela lui a permis d’acquérir des compétences particulières au métier de soudeur.
Au cours de ces six mois de formation, Danny a appris à préparer, assembler et réaliser des travaux de soudage de divers composants et accessoires. Plus spécifiquement, la tâche du soudeur consiste à préparer des pièces, à les assembler et à les souder selon les procédés GTAW ou RSW. En plus de contrôler les déformations, de polir des pièces, d’effectuer des traitements de surface et de contrôler la qualité des produits fabriqués. «Cette formation m’a donné les bases du métier, explique Danny. La balance, je l’ai appris par moi-même sur le marché du travail.»
Des entreprises qui recrutent

À la fin de sa formation, le Longueuillois a fait un stage chez Scène Éthique, une entreprise de Varennes spécialisée dans les infrastructures scéniques à grand déploiement et qui compte le Cirque du Soleil parmi ses clients. Il y a travaillé jusqu’en 2020, alors que la pandémie a lourdement ralenti les activités. Ensuite, il a été embauché chez DCM Soudure, à Saint-Bruno-de-Montarville, un atelier qui concentre ses activités dans le secteur de l’aéronautique. «Les contrats ne manquent pas! J’y évolue comme soudeur à temps plein.»
« Beaucoup de personnes ont essayé de me dissuader, soutenant que c’était impossible de devenir soudeur avec mon fauteuil, mais moi, je n’avais pas de doutes sur mes capacités. »
S'accomoder soi-même

La Commission des normes de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) garantit à un travailleur handicapé par son travail le droit à ce que son employeur fasse les efforts nécessaires pour l’accommoder, lui permettant de travailler à nouveau. Ce n’est pas le cas de Danny qui a eu son accident pendant une activité se déroulant à l’extérieur de son cadre de travail. À son emploi actuel, lorsqu’il a été question d’accommodements, Danny a senti que ses nouveaux employeurs ne savaient pas trop comment s’adapter à son handicap. Proactif, il a proposé de modifier lui-même son poste de travail afin qu’il soit bien adapté à son fauteuil. «C’est tout ce que cela prenait pour que je puisse demeurer productif. Pour moi, le fauteuil n’est vraiment pas un problème.»
Des projets pour l'avenir
Avec les percées de la recherche et les avancées technologiques, Danny pourra peut-être un jour remarcher. «Je n’ai pas encore accepté mon accident, mais aujourd’hui je suis en paix.» Évidemment, son handicap lui occasionne parfois des désagréments?: «C’est chiant, surtout pour les transports, l’hiver, la neige… Et aussi les équipements adaptés sont extrêmement chers, alors moi, surtout maintenant que je sais souder, si j’ai besoin de quelque chose, je le fabrique moi-même.» Pour ce travailleur, il ne fait pas de doutes qu’il y a une réflexion à faire collectivement pour faire une plus grande place aux employés en situation de handicap?: Les gens catégorisent vite et nourrissent des craintes souvent injustifiées. Il faut enlever les préjugés et laisser la chance aux coureurs.»
Ce portrait fait partie de la série Diversité FPT, une initiative soutenue par la Fondation RBC et réalisée par Compétences Québec. Par l’entremise d’une trentaine de portraits de tous les horizons, cette série propose une diversité de points de vue sur la formation professionnelle et technique et les métiers spécialisés au Québec.
