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Heather Lidberg, se battre contre les préjugés pour mieux bâtir l’avenir

Publié le : 8 mars 2022
Heather Lidberg, se battre contre les préjugés pour mieux bâtir l’avenir

En 2018, la charpentière Heather Lidberg, Vancouvéroise d’adoption, et sa fiancée originaire de Pointe-Claire ont décidé de venir vivre au Québec. Elles ont été attirées par le coût de la vie plus accessible, le goût de l’aventure et l’opportunité de réaliser leurs rêves dégagés du poids du loyer mensuel à Vancouver.

Elles espéraient renouer avec un sentiment de communauté qu'elles ne trouvaient plus dans la grande ville. « Nous avons tout vendu excepté nos outils, résume-t-elle. J’adore le Québec, sa culture, les restaurants, il ne me reste plus qu’à nous y faire une place dans le système. »

Reconnaissances des acquis

Reconnaissances des acquis
Heather Lidberg a étudié en charpenterie au British Columbia Institute of Technology (BCIT).

À son arrivée au Québec, Heather et Alika se sont installées à Rigaud. Heather a entrepris les démarches pour obtenir sa licence d’entrepreneure auprès de la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) au centre NOVA Career de Châteauguay.

Elle a également entamé le processus de reconnaissance des acquis (RAC) au Centre de formation professionnelle Châteauguay Valley (CVCEC), à Ormstown, en Montérégie. Pendant son inscription, quelqu’un l’a interpellée : « Il faut absolument que vous rencontriez le directeur ! » Quelques mois plus tard, Heather enseigne la charpenterie à temps partiel ainsi que le programme de RAC aux nouveaux arrivants et aux gens qui arrivent des autres provinces du Canada.

Construire autrement

Construire autrement
Vancouvéroise d’adoption, elle a traversé le pays pour venir travailler au Québec et fondé, avec sa partenaire, son entreprise : Nova women builders.

Avant d’avoir toutes les autorisations pour travailler dans l’industrie de la construction au Québec, Heather et sa partenaire ont démarré leur entreprise de rénovation domiciliaire Nova women builders et enchaîné les contrats dans l’est de l’Ontario où les démarches administratives pour opérer une entreprise de construction sont moins restrictives : « Nous construisons et rénovons des maisons.

Pour chaque famille, il s’agit d’un gros investissement d’argent; c’est souvent un élément marquant de la vie. Nous avons la chance de partager avec eux ce moment. C’est un métier qui enracine et qui rend fière. Il comporte une grande part d’accomplissement. »

Espace insécable

Espace insécable
En parallèle de son métier, elle enseigne également la charpenterie au Centre de formation professionnelle Châteauguay Valley (CVCEC), à Ormstown, en Montérégie.

Comme enseignante, Heather considère qu’il est de sa responsabilité de créer et d'assurer un espace sûr et respectueux de tous, un safe space, pour utiliser l’expression anglaise consacrée. L’intimidation, la discrimination, c’est tolérance zéro. L’éducation a le pouvoir de faire tomber les barrières : « C’est important de se sentir bien accueilli pour apprendre et évoluer, cela contribue à la santé mentale. Je veux aussi que les élèves sentent que je suis là pour eux et que je les écoute. »

Lors de la lecture de syllabus en début de cours, elle demande aux élèves de s’engager à contrer l'intimidation, ou toutes autres formes limitatives faisant référence à la race, au poids, à l'ethnie, à la religion, aux handicaps, à l'orientation sexuelle ou au genre : « Je veille à ce que l’environnement soit exempt de toute forme de harcèlement. Nous sommes tous responsables de nos actions, y compris par les mots et les commentaires. »

La place des femmes

La place des femmes
Portée par ses convictions, elle s’engage quotidiennement afin de valoriser la place des femmes dans le milieu de la construction.

Pour Heather, aucune femme ne devrait avoir à changer pour intégrer dans les métiers traditionnellement masculins : « Nous n’avons pas à nous adapter, simplement à être nous-mêmes. Le domaine de la construction constitue la dernière industrie où les femmes n’ont pas encore réussi à percer.

Quand il y aura plus de femmes, ce sera un vrai game changer. » À ce propos, Heather fait remarquer que le métier de charpentier-menuisier est en grande pénurie au Québec; il faudrait des milliers de charpentiers pour répondre aux besoins dans les années qui viennent, et ce de nombre, la moitié pourrait être des femmes alors qu’elles ne représentent que 1,59%1.

Comment faire évoluer les choses ? Heather a de nombreuses solutions à proposer : « Il faut changer le discours de la culture de masse, la dictature du rose et du bleu depuis le berceau, mais aussi, il faut voir davantage de filles dans les métiers traditionnellement masculins. Cela prend des incitatifs financiers pour aider les femmes à accéder aux formations dans ces métiers, et de l’aide pour la conciliation travail-famille, notamment avec les services de garde. »

« Cela prend des incitatifs financiers pour aider les femmes à accéder aux formations dans ces métiers, et de l’aide pour la conciliation travail-famille, notamment avec les services de garde. »

Heather Lidberg, charpentière et enseignante

D’autres champs dominés par les hommes

D’autres champs dominés par les hommes
Selon elle, « Il faut changer le discours de la culture de masse, la dictature du rose et du bleu depuis le berceau, mais aussi, il faut voir davantage de filles dans les métiers traditionnellement masculins. »

Heather est née à Kindersley et a grandi à Moose Jaw, une petite communauté en Saskatchewan. Ses parents, fermiers, l’ont toujours encouragée à réalise ses rêves. À l’école secondaire, Heather était de toutes les équipes sportives; elle jouait au hockey et rêvait de joindre la Gendarmerie royale du Canada.

En 1995, après sa première année dans un Community College, elle a été appelée par l’armée et s’est enrôlée dans l’artillerie. Elle a été Casque bleue en Bosnie. Mais sa carrière militaire s’est terminée en 2001. La vétérane a alors décidé de retourner étudier. Ella a fait un baccalauréat en beaux-arts et nouveaux médias et une maîtrise en beaux-arts documentaires et médias à l'Université Ryerson à Toronto. Heather a ensuite enseigné au Mexique, vécu à Buffalo, près de New York avant de revenir au pays et de s’installer à Vancouver au début des années 2000.

L’apprentissage du métier

Entre les contrats lorsqu’elle n’avait pas la possibilité d’enseigner, Heather s’est initiée à la construction. Elle a rénové une farmhouse, fait un flip de maison. Après plusieurs projets de rénovation, elle a décidé d’étudier en charpenterie au British Columbia Institute of Technology (BCIT).

« Je voulais apprendre à faire les choses comme il se doit, maîtriser les techniques et m’assurer d’avoir de bonnes pratiques sécuritaires », explique Heather. La formation y est très différente qu’au Québec : les étudiants suivent quatre modules de sept semaines, entrecoupés par des périodes en entreprise. C’était important pour moi d’aller chercher les compétences, et j’adore les maths. »

Elle a ensuite évolué quelques années dans le secteur avant de conclure qu’il était impossible de survivre comme charpentière à Vancouver. Elle a alors lancé sa propre entreprise et combiné les travaux résidentiels avec d’autres projets de construction en cinéma, en télévision, ou encore pour les arts de la scène.

S’engager pour faire avancer les choses

De façon générale, en construction, Heather témoigne d’une atmosphère toxique, douloureuse, teintée de patriarcat et de sexisme systémique : « Le mansplanning2 est monnaie courante. »

Féministe optimiste, elle considère que la lutte pour les droits des femmes n’est pas terminée : « Je suis reconnaissante à toutes les femmes qui ont mis leur vie en jeu pour que nous ayons plus d'opportunités aujourd'hui. Nous avons encore un long chemin à parcourir, mais ensemble, nous pouvons déplacer des montagnes. »

« Les femmes n’ont pas à changer pour intégrer dans les métiers, nous n’avons pas à nous adapter, simplement à être nous-mêmes. »

Heather Lidberg, charpentière et enseignante

  1. Programme d'accès à l'égalité des femmes dans l'industrie de la construction (PAEF) 2015-2024, CCQ
  2. Le mansplaining est un concept popularisé par les féministes américaines dans les années 2010 qui désigne une situation où un homme (en anglais « man ») expliquerait (en anglais « explain ») à une femme quelque chose qu'elle sait déjà, sur un ton généralement paternaliste ou condescendant. Source : Wikipédia.

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