Premiers choix de carrière Après quelques années difficiles, Joliane Chartier, accompagnée par une conseillère d’orientation, a choisi de s’orienter vers un DEP en techniques d’usinage à l’âge de 30 ans. Joliane aime les tâches manuelles. Deuxième d’une famille de trois filles élevées dans un petit village de l’Abitibi, elle se rappelle avoir toujours mis la main à la pâte pour faire sa part des tâches à la maison. C’était une enfant docile et joviale qui adorait l’école.
Très engagée dans les comités, elle s’investit aussi dans les sports au secondaire. Joliane a étudié en arts plastiques au cégep, avant d’entreprendre un baccalauréat en enseignement des arts à l’Université Laval, qu’elle a abandonné après un an. Elle a ensuite amorcé un autre baccalauréat, en psychoéducation, mais elle a dû quitter l’université lorsqu’elle est tombée enceinte.
Réorientation Selon Statistique Canada (2018), le métier de machiniste est masculin à 93,8 %. Le vieillissement de la main-d’œuvre devrait, en théorie, accélérer l’intégration des femmes. Dans les années suivantes, Joliane a occupé divers emplois : elle a planté des arbres, été préposée aux bénéficiaires, intervenante en santé mentale, puis avec les handicapés. Elle est ensuite retournée travailler à titre d’ouvrière en sylviculture. Dans cet emploi traditionnellement masculin, Joliane devait coordonner les coupes et les activités de plantation, conduire les équipes et faire le contrôle de qualité.
En 2011, épuisée, après une séparation, un épisode d’épuisement professionnel et quelques mois sombres dans l’univers de la consommation, Joliane entame une thérapie, puis une réflexion sur son avenir professionnel.
Elle a l’idée d’aller suivre un diplôme d’études professionnelles (DEP) en coiffure, car on lui a toujours dit qu’elle avait du talent dans ce domaine. Au centre de formation, en regardant son parcours, un conseiller lui suggère plutôt les techniques d’usinage. Ses arguments convainquent Joliane.
Retour au DEP Aucune des compétences requises pour exercer le métier de machiniste n’est définie par le sexe selon Joliane Chartier. À 30 ans, mère monoparentale, elle entreprend une formation de 1800 heures en vue d’obtenir son DEP en techniques d’usinage.
Avec l’aide d'Emploi-Québec, et l’appui de ma famille, je suis redevenue une élève modèle. J’ai découvert un métier passionnant pour lequel j’avais les aptitudes. Cela fait tellement de bien d’être dans quelque chose où l’on se sent exceller, d’entreprendre un projet et de le terminer, d’obtenir son diplôme.
Joliane Chartier, machiniste et enseignante en techniques d’usinage
Dans cette formation où les hommes sont plus que majoritaires, quelques garçons lui font parfois des blagues sexistes, mais Joliane est elle aussi capable de faire preuve d’humour. « Dans un milieu traditionnellement masculin, il vaut mieux ne pas être soupe au lait, commente-t-elle. Il faut faire preuve d’ouverture d’esprit et avoir confiance en ses capacités. » Son enthousiasme la désigne naturellement pour participer aux Olympiades québécoises des métiers, à Québec, une expérience qu’elle a adorée, même si le stress lui a fait perdre ses moyens à la fin des compétitions.
En pays d’hommes L’usinage se divise en cinq grandes familles de tâches : le tournage, le fraisage, l’alésage, le perçage et la rectification. Le machiniste travaille dans des usines qui fabriquent de la machinerie, des pièces d’automobiles et, entre autres, des pièces métalliques. Le métier de machiniste est le second en importance de la fabrication métallique industrielle. Cela consiste à fabriquer ou à réparer des pièces de métal à l’aide de machines-outils traditionnelles ou à commande numérique.
L’usinage se divise en cinq grandes familles de tâches : le tournage, le fraisage, l’alésage, le perçage et la rectification. Le machiniste travaille dans des usines qui fabriquent de la machinerie, des pièces d’automobiles et des pièces métalliques, entre autres.
Le métier exige de la dextérité, de la minutie et des aptitudes pour la lecture de plans et le calcul. La formation inclut aussi le langage de programmation exigé par le travail sur les machines-outils à commande numérique. Selon Statistique Canada (2018), le métier est masculin à 93,8 %. Le vieillissement de la main-d’œuvre devrait, en théorie, accélérer l’intégration des femmes1 .
Après son DEP, Joliane s’est retrouvée dans une usine où l’ambiance de travail n’était pas toujours agréable pour une femme, mais elle aime son métier. L’environnement est toutefois très bruyant, pas toujours sécuritaire et l’horaire de travail de 53 heures lui crée des casse-têtes d’organisation avec sa fille :
« Lorsqu’un ancien enseignant m’a appelé en 2018 pour me dire que le centre de formation d’Amos cherchait quelqu’un pour enseigner en techniques d’usinage, j’ai dit oui tout de suite, et je n’ai jamais regretté ce choix. »
Depuis, Joliane a rencontré son nouveau conjoint; elle a donné naissance à un garçon et s’est achetée une maison. À son centre de formation professionnelle, elle partage sa passion avec les nouvelles générations.
Les machinistes sont en mesure de fabriquer n’importe quoi à partir de zéro et d’amener chaque projet à son terme. Ils permettent aux manufactures de fabriquer une foule de choses; C’est un des plus beaux et vieux métiers du monde et, aussi, un des plus essentiels à notre société.
Joliane Chartier, machiniste et enseignante en techniques d’usinage
Oublions les stéréotypes Comme enseignante, Joliane a l’occasion d’encourager les filles à persévérer : « Elles terminent leurs études, mais sont nombreuses à abandonner vite lorsqu’elles arrivent sur le marché du travail, déplore-t-elle, j’essaie de leur faire valoir la saine compétition et tous les défis que propose le métier. Selon Joliane, aucune des compétences requises pour exercer le métier de machiniste n’est définie par le sexe.
Pour Joliane, l’intégration dans les métiers traditionnellement masculins est l’affaire de tous : « Nous élevons les filles dans l’idée de faire certains métiers, c’est dans notre inconscient collectif, et nous avons tous une responsabilité, comme parents, d’offrir à nos filles la liberté de faire leurs propres choix, qu’elles soient en mesure de s’imaginer dans les métiers non traditionnels. »
À 38 ans, Joliane est heureuse de son parcours : « Je suis fière d’avoir appris à m’affirmer, à nommer ce que j’aime et à dire non. Je suis fière d’avoir persévéré, entre autres pour ma fille, et d’être là pour elle. »
Source : PERFORM, Enquête sur le recrutement et les besoins de formation dans le secteur de la fabrication métallique industrielle, 2017, www.comiteperform.ca.
Le métier est difficile. C’est vrai que ce n’est pas adapté à tout le monde, mais, avec une façon d’organiser le travail de façon ergonomique et sécuritaire, c’est accessible. En créant des environnements de travail propices dans les usines, on peut régler les problèmes et cela aide tout le monde, les hommes comme les femmes.
Joliane Chartier, machiniste et enseignante en techniques d’usinage